Que ce soit en Ultim, en Ocean Fifty, en Imoca ou en Class40, les bateaux conçus par VPLP Design engagés dans la Transat Jacques Vabre 2021 ont fait preuve de fiabilité et affiché des performances très intéressantes, y compris les derniers-nés mis à l’eau peu de temps avant le départ. Les architectes Quentin Lucet, Xavier Guilbaud et Antoine Lauriot-Prévost font le bilan et se projettent sur la saison 2022, dont le point d’orgue sera la Route du Rhum.
Commençons par la classe Ultim. Comment jugez-vous les performances de SVR-Lazartigue (2e) et Banque Populaire XI (3e) ?
Xavier Guilbaud : Le bilan est très positif. Ils sont arrivés en Martinique sur le podium et à 100 % de leurs capacités, ce qui est remarquable seulement quelques mois après leur mise à l’eau. Les skippers voulaient avant tout accumuler les milles et engranger de l’expérience. Ils n’ont donc pas pris de risques excessifs.
Quentin Lucet : Il faut saluer le travail remarquable effectué par les équipes techniques pour s’approprier ces trimarans très complexes. Elles ont été capables de les fiabiliser en seulement quelques mois. Les deux bateaux ont été complètement dans le match, et dans certaines conditions, on a observé des phases très intéressantes où ils faisaient preuve d’une vitesse supérieure.
C’est encourageant pour la Route du Rhum 2022…
Xavier Guilbaud : Oui, François Gabart et Armel Le Cléac’h peuvent espérer prendre le départ de la Route du Rhum avec des bateaux très au point. Nous avons vu que ces Ultims peuvent tenir des vitesses moyennes élevées « facilement ». C’est encourageant pour le Rhum et à plus long terme pour le tour du monde en solitaire [prévu fin 2023, NDLR]. On sait qu’il faut au moins plusieurs saisons pour maîtriser pleinement ces bateaux.
Qu’avez-vous pensé de la course d’Actual Ultim 3 (4e) ?
Xavier Guilbaud : Actual reste une très bonne machine, qui n’a pas été aidée par la météo. On sait que le bateau est moins à l’aise en dessous de 12-14 nœuds de vent. Dans ces conditions, les nouveaux trimarans volent, pas Actual. On peut penser qu’avec davantage de vent, les écarts auraient été plus faibles. Cette plateforme, très saine, a encore un potentiel d’évolution, avec de nouveaux appendices par exemple, et peut tout à fait être dans le match pour la Route du Rhum.
Passons aux Ocean Fifty. Quel bilan tirez-vous dans cette classe ?
Antoine Lauriot-Prévost : Nous avons conçu quatre des sept Ocean Fifty engagés : Koesio (2e), Leyton (3e), Solidaires en Peloton (4e) et Groupe GCA – 1001 Sourires (6e). Aucun de ces bateaux n’a gagné mais tous sont arrivés et leurs performances ont été encourageantes, notamment le dernier-né Koesio, un bateau léger dont le comportement a été remarquable au portant VMG. En termes d’ergonomie, la zone de vie et de manœuvres totalement au sec a aussi fait ses preuves. Quand les marins peuvent régler sans s’exposer à la mer et au vent, ils ne rechignent pas. C’est un gage de performance sur la durée. Koesio avait clairement le potentiel pour gagner. Leyton et Solidaires en Peloton ont aussi navigué aux avant-postes. Quant à Groupe GCA – 1001 Sourires, il a tenu des moyennes très impressionnantes sur certaines phases, ce bateau a encore de belles années devant lui. Le bilan est positif et nous espérons transformer l’essai lors de la Route du Rhum 2022. Je pense particulièrement à Koesio dont la courbe de progression semble énorme.
En Imoca, Charal a terminé sur le podium, comme il y a deux ans, est-il à sa place ?
Quentin Lucet : Charal a navigué dans le trio de tête dans une configuration quasiment inchangée depuis son retour du Vendée Globe, l’équipe de Jérémie Beyou ayant décidé d’avancer plutôt sur le développement de son futur bateau. Il y a encore de nombreuses voies d’amélioration sur Charal, notamment au niveau des ballasts et des foils, en prévoyant des renforts structurels si besoin. C’est un peu frustrant de ne pas avoir vu l’ex Hugo Boss [désormais aux mains d’Alan Roura, NDLR] sur cette Transat Jacques Vabre. Les conditions auraient été très adaptées pour ce bateau. Mais on pourra le voir s’exprimer sur la Route du Rhum 2022, avec Alan Roura.
Pour la première fois, un Class40 signé VPLP Design s’alignait au départ d’une course, quel regard portez-vous sur la performance d’Emile Henry-Happyvore (13e) ?
Quentin Lucet : Ce Class40 a été mis à l’eau quelques semaines avant le départ. Le bateau est bien né, il n’y a aucun problème structurel à déplorer. Nous avons été agréablement surpris de voir Erwan Le Draoulec et Nicolas d’Estais (skipper du bateau) dans le match alors qu’ils sont au tout début de la phase d’apprentissage. Ils ont rivalisé en vitesse avec des bateaux à des stades de maturité plus élevés. Nous sommes contents du design de la coque. Nous avions pris le temps d’analyser la flotte existante, les points forts et les points faibles des autres concepts. Ce travail paye. Le bateau répond bien à nos attentes et on peut espérer des gains en performance considérables d’ici le départ de la Route du Rhum.